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L'étrange massacre de Ham Hill
Le mythe du bon sauvage en prend encore un coup : près de Yeovil dans le Somerset anglais, des fouilles archéologiques révèlent les traces d’un massacre de masse. Des centaines, voire des milliers de gens y ont été tués à l’Âge du Fer, et certains ont été dépecés et charcutés.
Certains restes humains du site portent clairement des marques de découpe : des traces de lame, répétées et parallèles, s’arrêtent sur les articulations qu’elles ont probablement servi à disjoindre. Le professeur Marcus Brittain, archéologue de Cambridge et directeur des fouilles du site de Ham Hill, explique les gestes des propriétaires des lames : « C’est comme s’ils avaient cherché à séparer les parties des corps. »
Ce n’est pas la première fois qu’on retrouve des signes de dépeçage sur des restes humains de l’Âge du Fer, mais l’étendue du massacre de Ham Hill est exceptionnelle.
Le site, qui est le plus grand chantier de fouilles de cette époque en Angleterre, s’étend sur une surface équivalente à cent vingt-trois terrains de foot et est entouré d’une enceinte de pierres. Seule une toute petite partie en a été excavée à ce jour, mais il est déjà évident que « des centaines, si ce n’est des milliers, de corps » y sont enterrés. « Il est tout à fait inhabituel de trouver un tel nombre de corps sur un seul site », explique le professeur Brittain.
Ces corps datent probablement du 1er ou du 2e siècle de notre ère, bien que le site ait été occupé pendant des millénaires. Les oppidums comme celui de Ham Hill datent généralement d’une époque qui s’étend du premier millénaire avant J.-C. jusqu’à la conquête romaine. Au Royaume-Uni, il est rare qu’on y fasse des fouilles parce qu’ils sont classés comme monuments historiques.
Mais le site de Ham Hill abrite une importante carrière de pierres utilisées pour la restauration de nombreux monuments anciens du Sud de l’Angleterre. Une autorisation spéciale d’extension de la carrière n’a été accordée qu’en échange du financement de fouilles archéologiques à grande échelle par les universités de Cambridge et de Cardiff. C’est ainsi que le massacre de Ham Hill est remonté à la surface.
Le paysage idyllique du site, tout en verdure et en collines, tranche – si l’on ose dire – avec la quantité de restes humains inhumés dans son sous-sol. Les familles qui viennent, de nos jours, pique-niquer sur le site étaient loin de s’imaginer ce qui s’y était passé il y a près de 2000 ans…
Les raisons de ce massacre restent encore inexpliquées. Tout ce qu’on sait, c’est qu’il est à peu près contemporain du début de l’invasion romaine en Angleterre. Quelques pièces d’équipement militaire typiquement romain, comme des fers de projectiles de balistes, ont été retrouvées au milieu des corps. Ces fers, pesants et tranchants, ressemblent à des pointes de flèche mais en beaucoup plus gros. « Ils devaient être tirés par des catapultes », estime le professeur Brittain, or seules les armées romaines disposaient de tels matériels de guerre.
Une explication possible du massacre serait que les Romains aient utilisé l’oppidum de Ham Hill come site d’exécution où ils se seraient débarrassés de ceux qui troublaient l’ordre romain ou qui se querellaient avec des tribus alliées ; cependant, la pratique du dépeçage était très inhabituelle dans les légions romaines, de sorte que cette hypothèse est peu crédible.
Le dépeçage des cadavres était en revanche une pratique assez répandue chez les Grands-Bretons de l’Âge du Fer, qui avaient l’habitude de décorer leur dessus-de-porte avec des crânes humains.
Pour Christophe Evans, directeur de l’Unité Archéologique de Cambridge, les fouilles de Ham Hill posent plus de questions qu’elles n’apportent de réponses.
À l’intérieur de l’enceinte de l’oppidum, des traces de vie domestique datant de la première occupation du site ont été retrouvées ; à cette époque, les gens vivaient dans des maisons en bois et en torchis.
Outre des tessons de poterie datant de l’Âge du Fer et de l’époque romaine, les archéologues ont retrouvé un site de macabres rites funéraires : alignements de crânes humains, corps jetés dans une fosse où ils sont restés à l’air libre et où ils ont été mangés par des animaux charognards… Qui plus est, une majorité des corps étaient des femmes. « C’est bizarre, sans aucun doute » dit le professeur Brittain.
Caturix